Une année s'achève, une autre commence. Cycle sans cesse renouvelé des mois, alternance immuable des saisons... Le temps qui défile est par nature évanescent, insaisissable. Il coule, implacable, sans jamais s'arrêter, insensible aux occupations éphémères de l'espèce humaine. Comme l'écrivait le philosophe Gaston Bachelard, « le temps n'a qu'une réalité, celle de l'instant. » Et tous ces instants, tous ces petits bouts d'éternité consumés l'un après l'autre, tombent siècle après siècle dans la mémoire collective, ce que nous appelons l'Histoire, celle avec un grand H. Les souvenirs des heures héroïques ne sont que les héritiers indélébiles du temps qui passe.
Plus un événement s'éloigne de nous dans le temps, moins il est présent à l'esprit de générations ne l'ayant pas vécu. Qui, par exemple, hormis quelques passionnés, curieux ou spécialistes, se soucie encore des épreuves endurées par les soldats de la guerre de 1870 ? Tout cela paraît tellement ancien ! Ceux de 14 arrivent, pour leur part, au seuil des limbes de l'oubli. Surtout depuis les disparitions successives de personnalités telles que Lazare Ponticelli, Franck Buckles ou Claude Choules, derniers combattants connus de la Grande Guerre. Que restera-t-il de l'enfer des tranchées, que restera-t-il du quotidien de ces hommes du front dans cinquante ans ? Et bientôt, 1944...
C'est pourquoi les grandes commémorations prévues en cette année 2014 revêtent tant d'importance. Elles offrent en premier lieu l'opportunité d'honorer les disparus. Elles permettent ensuite de témoigner notre reconnaissance aux acteurs de ces tragédies toujours avec nous. Elles sont enfin une leçon, une invitation à ne jamais rien oublier du passé pour éviter de reproduire ses erreurs. Si tant est que cela soit possible... La Normandie sera bien sûr au centre de toutes les manifestations, en juin d'abord, pour évoquer le Débarquement, à partir de l'été ensuite, pour rappeler le centenaire du déclenchement de la Première Guerre mondiale. Patrimoine Normand évoquera ces deux événements majeurs dans ses colonnes, en tentant toujours d'apporter son regard, original et personnel.
En attendant, c'est avec cette même volonté de préserver et de transmettre la mémoire, qu'elle soit immatérielle ou monumentale, que nous vous proposons d'ouvrir ce numéro d'hiver de votre magazine. Vous trouverez au fil des pages quelques rubriques nouvelles qui, nous l'espérons, sauront vous séduire. Vous rencontrerez également des figures étonnantes et attachantes, comme le patron de presse Ernest Vaughan, qui prit le risque de publier le fameux J'accuse d'Émile Zola, ou l'escroc de haut vol Clément Passal, sorte d'Arsène Lupin un brin raté. Nous vous emmènerons aussi au Bec-Hellouin, l'un des plus beaux villages de France posé dans son écrin de verdure. Dans la foulée, nous irons prendre un bol d'air au mont Saint-Michel, grâce au téléobjectif de Vincent M. Et une foule d'autres sujets encore...
Nombreux sont ceux qui courent aujourd'hui le monde à la recherche de sensations nouvelles, d'ouverture d'esprit, d'authenticité et de grands espaces. S'éveiller aux autres cultures est certes louable et même indispensable, mais il ne faut jamais oublier de regarder près de chez soi. Le frisson de la découverte, le dépaysement sont au coin de votre rue !
Toute la rédaction de Patrimoine Normand vous souhaite une bonne et heureuse année 2014.
La rédaction.